Raymond la tortue
Il était une fois une tortue marine. D’une dimension correcte et d’une santé de fer, notre curieux reptile répond au nom de Raymond. Voici son histoire.
Né dans un trou de sable une nuit de juillet, Raymond n’a pas connu ses parents, une rumeur disait de toute façon qu’il était le fruit d’un coup d’un soir. Dès les premiers instants de sa vie, il a dû se battre pour survivre. En effet, à l’âge de 45 secondes il avait déjà échappé de justesse à un serpent puis un phoque quelques jours plus tard. On raconte même qu’à l’âge d’ 1 an il survécu à trois cormorans. Malgré ces premières mésaventures, nous pouvons dire que Raymond eu une enfance plutôt heureuse. Eduqué par un cousin germain qu’il rencontra par hasard dans une barrière de corail, il prit ensuite sa carapace d’indépendance vers l’âge de 22 ans afin de démarrer une vie d’aventurier.
Un poisson sans nageoires. Un animal sans branchie. Un être vivant sans écaille. Ray venait de rencontrer un homme.
Très rapidement dans le milieu de la tortue, tout le monde le surnomma Ray le vagabond, car plus qu’aucune autre tortue au monde, il voyageait sans cesse. Véritable baroudeur, il tatoue sur sa carapace chaque nouvelle contrée qu’il découvre et raconte ses péripéties à chaque congénère qu’il rencontre. Gonflant ainsi sa légende d’aventurier.
Dans la force de l’âge, vers 55 ans, un matin comme les autres, ensoleillé et doux, Ray décida de partir en vadrouille après son petit déjeuner. Par hasard, un fort courant marin le guida vers une île qu’il ne connaissait pas. Curieux, il prit la sortie de cette autoroute marine afin découvrir de plus près la péninsule. Alors qu’il approchait des côtes, une ondulation particulière à la surface l’intrigua. Il s’agissait d’une houle parfaite formant des vagues tubulaires. Curieux, Ray essaya de s’amuser dans ces mouvements linéaires, périodiques et magnifiques, le tout dans une eau turquoise. Certes moins agile que ces amis dauphins et que ces imbéciles de phoques, il maitrisaît de plus en plus ce jeu de vitesse et de technique. Il arrivait à se laisser glisser sous l’ondulation, en s’éjectant au dernier moment de l’aspiration du tube avant que la houle ne se brise.
Quand soudain, il se rendit compte qu’au-dessus de la surface, autre chose glissait. C’était un tronc d’arbre plat et blanc doté de trois cailloux aiguisé à l’arrière ! Ce tronc d’arbre surfait littéralement sur la vague, se mettant au plus profond du tube pour en sortir au dernier moment. C’était un spectacle incroyable ! Tout à coup, une vague plus grosse que les autres arriva, alors Ray plongea afin de ne pas se faire emporter par l’énergie de cette bombe. Cependant, le fameux tronc d’arbre ne décida pas de plonger à son tour mais partit sur cette énorme masse d’eau et chuta. La vague emporta tout sur son passage, c’est ainsi que notre tortue découvrit pour la première fois cette chose. Un poisson sans nageoires. Un animal sans branchie. Un être vivant sans écaille. Ray venait de rencontrer un homme.
Ce dernier était dans une situation plutôt compliquée, le haut-bas qu’il venait de faire était très impressionnant, c’était un gros Wipeout ! (Vocabulaire « surfistique » que les tortues ont pu apprendre dans les Surf Session de la bibliothèque de l’Atlantide). Une seconde vague projeta le surfeur encore plus profondément sous l’eau et sa tête heurta le reef. Inanimé, il était en train de se noyer. Alors Ray mit en marche tous ses muscles sous sa carapace pour pincer cet homme par la seconde peau qui l’entourait afin de le ramener à la surface. Le contact avec cet être si différent de lui était contraire à son instinct, mais le moment qu’il venait de vivre ensemble, le partage de cet océan l’avait rapproché de cet inconnu. Une fois ramené à l’air libre, il prit la décision de vite repartir dans les profondeurs de l’océan. Le bec de Ray, adapté à la salade et aux petits poissons, ne permettant pas de faire de « bec-à-bouche », il espéra que d’autres personnes de son espèce lui viendraient en secours.
Un poisson sans nageoires. Un animal sans branchie. Un être vivant sans écaille. Ray venait de rencontrer un homme.
Retournant au large, fort de cette aventure, il devait maintenant me mettre au souper. Sur le chemin du retour, il vit à plus de 200 oursins de distance une méduse immense, grasse, comme il les aime. En plus, elle ne bougeait pas beaucoup, c’était la proie idéale. Alors Ray rassembla toutes ses dernières forces pour l’attaquer et surtout la dévorer ! Cependant, lorsqu’il croqua en plein dedans, il découvrit avec stupeur une méduse sans goût, sans aucune saveur et d’une texture qui lui était jusque-là inconnu. Du plastique. Ce repas rendit tellement malade notre Raymond qu’il en perdit la vie. RIP RAY.
Nous partageons le même milieu et parfois les mêmes passions que Raymond. Alors n’oublions pas ceux qui vivent sous les vagues lorsque que nous rentrons chez nous après notre session.